Recensions d’ouvrages
Ouvrage : Gérard Bonet, L’Indépendant des Pyrénées-Orientales. Un siècle d’histoire d’un quotidien, 1846-1950. L’entreprise, le journal, la politique (Publications de l’Olivier, 2004). Recension par Gilles Feyel.

Avec ce livre important, Gérard Bonet achève de nous donner une histoire qu’il avait débutée dans un premier ouvrage, L’Indépendant des Pyrénées-Orientales. Un journal dans l’histoire. L’histoire d’un journal, 1846-1848, Perpignan, 1987, 416 p. Journal « bidéparmental » diffusé dans les Pyrénées-Orientales et dans l’Aude, L’Indépendant, tout comme La Dépêche de Toulouse, bénéficie désormais d’une histoire solide et bien documentée. Son auteur, diplômé de journalisme et docteur en histoire, journaliste à L’Indépendant, a su retrouver et exploiter au mieux les archives privées du journal et de ses principaux acteurs – les fondateurs, les familles Guiter et Lefranc-Bargeton, et leurs successeurs, les familles Brousse et Escarguel-Chichet. Malgré des lacunes qu’il déplore – par exemple, les documents comptables du journal, de son imprimerie et de l’entreprise en général paraissent avoir irrémédiablement disparu – cet ensemble est fort riche : on y trouve notamment les registres des comptes rendus des assemblées générales des actionnaires du journal (23 août 1868-10 novembre 1895) et le registre des procès-verbaux de ses conseils d’administration (16 février 1892-6 mai 1939), les intéressants « carnets de Georges Brousse », présentant de janvier 1942 à février 1944 l’évolution de l’état d’esprit du patron d’un journal paraissant pendant l’Occupation, tiraillé entre ses préférences politiques droitières, son engagement vichyssois mais aussi ses interrogations sur l’évolution du régime et ses réactions de refus face à la censure allemande après novembre 1942 ou aux pressions locales de la Milice de Darnand, enfin le très important dossier de la suppression-résurrection de L’Indépendant entre août 1944 et avril 1950. Outre la trentaine de témoignages oraux qu’il a su susciter et recueillir, Gérard Bonet a consulté de très nombreux cartons dans les fonds publics, pour les périodes les plus anciennes, mais aussi pour l’Occupation, la Libération, la fin des années 1940 : Archives communales de Perpignan, Archives départementales des Pyrénées-Orientales et de l’Hérault, Archives nationales, Archives de la Préfecture de police de Paris, Bibliothèque nationale de France, etc. En ce qui concerne les collections de L’Indépendant, la première période 1846-1848 serait uniquement présente à la Bibliothèque municipale de Perpignan ; la deuxième 1868-1944 et la troisième depuis 1950 sont conservées au journal, leur numérisation intégrale est en cours et devrait être achevée en 2006 ou 2007. Outre ces onze pages de sources, les quinze autres de bibliographie et les soixante-huit pages de notes très précises viennent prouver que nous avons là affaire au travail d’un véritable historien, nourri de lectures solides et sérieuses fort bien utilisées.
Comme l’indique le sous-titre de l’ouvrage, son auteur a conduit de front trois histoires. L’entreprise : ses actionnaires et ses dirigeants, ses diverses activités et l’évolution de son imprimerie. Le journal : ses formats successifs du bihebdomadaire au quotidien, son évolution depuis la feuille d’opinion réservée à quelque 800 abonnés au début de la Troisième République, puis tirée à 5 000 exemplaires en 1895 alors qu’elle est vendue 5 centimes le numéro depuis 1874, 10 000 en 1903-1904, 20 000 en 1914, jusqu’à la grande feuille d’information de l’Entre-deux-guerres, parvenant à 36 000 exemplaires en 1939 et dépassant les 50 000 pendant l’Occupation. Son combat politique : le « radicalisme » républicain des origines, incarné par la famille Arago et Théodore Guiter, le fondateur ; l’engagement républicain jamais démenti de leurs successeurs Pierre Lefranc et Lazare Escarguel, un engagement accompagné d’une modération politique revendiquée à partir des années 1880, finissant par installer le « parti de l’Indépendant » dans un ni-ni – « ni réaction, ni révolution » – qui conduit Emmanuel Brousse, l’un des dirigeants du journal, député de 1906 à 1926, à le rallier à l’Alliance républicaine, ce parti qui a facilité, dès avant la Grande Guerre, le retour des droites au sein de la République ; les années 1930 pendant lesquelles le « parti de L’Indépendant » n’a plus de représentation parlementaire et voit diminuer son influence politique locale ; enfin l’engagement vichyssois ambigu des années noires de l’Occupation.
En une série de 38 courts chapitres, le livre est bâti sur un plan chronologique faisant se succéder quatre parties. Les deux premières présentent le journal et son entreprise jusqu’à la fin du printemps 1940 : c’est d’abord le « temps du “journal-parti” (1846-1848, 1868-1926) », 175 pages, l’époque des fondations de la fin des années 1840, rapidement évoquée par les quatre premiers chapitres, puis celle du temps des notables après la résurrection de 1868 et la définitive installation de L’Indépendant à Perpignan et dans le département des Pyrénées-Orientales, accompagnée de la montée en puissance de l’outil industriel de l’imprimerie – ou des imprimeries, faut-il mieux dire, puisque les dirigeants de L’Indépendant ont su monter une importante imprimerie de labeur à côté de leur imprimerie de presse ; c’est ensuite la deuxième partie consacrée aux années 1926-1940, 98 pages clôturées par un chapitre de synthèse présentant « la réussite économique d’une entreprise », alors que le journal privilégie sa fonction d’information sans oublier ses engagements droitiers, sous la direction de la jeune génération des deux familles Brousse et Escarguel-Chichet – une quinzaine d’années de grande prospérité, pendant lesquelles l’argent coule à flot, même au début des années 1930, et s’achevant sur l’inauguration de la nouvelle imprimerie lithographique de labeur, ultramoderne, le 2 avril 1939. Les deux dernières parties, 120 et 125 pages présentent de manière très précise – parfois un peu trop – la période de l’Occupation et « la bataille pour la réhabilitation (1944-1950) ». Alors qu’il y a encore peu de temps – en 2001 – l’histoire de La Dépêche de Toulouse, elle aussi « réhabilitée » en 1947, était l’objet de nouvelles polémiques, la dernière partie est bienvenue proposant l’étude du cas similaire et fort rare d’un journal supprimé à la Libération, « acquitté » ensuite de sa conduite pendant l’Occupation et « ressuscité » en 1950, malgré l’engagement prononcé de son directeur Georges Brousse en faveur de Laval et de sa politique de collaboration : avec une grande impartialité et une toute aussi grande clarté, l’auteur nous en fait découvrir le pourquoi et le comment, les démêlés entre le CDL de Perpignan et le député socialiste Louis Noguères qui finit par s’annexer Le Républicain du Midi, le quotidien résistant imprimé et publié en lieu et place de L’Indépendant, la conduite ambiguë de Georges Brousse pendant l’Occupation, qui paraît avoir fait « passer » en Espagne quelques « dissidents » dont une famille juive, tout en refusant les pressions de la censure allemande, ce qui lui valut la déportation à partir de mars 1944 et d’être fusillé en avril 1945 lors de l’évacuation désordonnée de son camp de concentration, le précédent de l’acquittement et de la reparution de La Dépêche, les hésitations des employés et des ouvriers de l’imprimerie, enfin la ténacité des deux familles Brousse et Chichet à faire valoir ce qu’elles estimaient être leur bon droit.
Laissons le lecteur apprécier par lui-même tout cela, pour souligner plus particulièrement tel ou tel apport important de cet ouvrage à l’histoire de la presse ou bien critiquer tel ou tel détail. Incontestablement, il y a là une bonne histoire économique et industrielle d’un journal départemental et de son imprimerie. Gérée avec beaucoup de prudence, l’entreprise apporte à ses actionnaires des bénéfices immédiatement réinvestis dans la rédaction et ses sources d’information, le matériel de l’imprimerie, l’organisation du réseau de distribution ou la réserve pour des investissements ultérieurs. Cette « gestion de bon père de famille » est peu prodigue en dividendes, au moins jusqu’à l’Entre-deux-guerres. Sans malheureusement disposer d’aucun chiffre sur les charges de l’entreprise, Gérard Bonet présente ses recettes (ventes par abonnement ou au numéro, annonces, enfin recettes propres de l’imprimerie pour le labeur ou l’impression d’autres périodiques), son chiffre d’affaires, tout cela entre 1871 et 1895, enfin ses bénéfices. On notera que le journal est très longtemps resté une feuille d’abonnés, jusqu’en 1885-1886, alors qu’il est vendu 5 c le numéro depuis 1874 ; par la suite, les recettes de vente au numéro croissent de plus en plus pour devenir deux fois plus importantes que celles d’abonnement dès 1888-1889, mais ces dernières fournissent encore 15 % des recettes générales de l’entreprise en 1894-1895. C’est peut-être cette prégnance de l’abonnement qui explique le soin de l’auteur à nous détailler la moindre baisse des tarifs postaux, par exemple p. 172, alors qu’il ne nous dit rien ou à peu près rien sur le réseau de messageries très certainement organisé par le journal pour sa diffusion au numéro : tout juste quelques mots sur l’action de Jules Escarguel s’efforçant de multiplier les dépositaires de son journal en 1893 (p. 142), quelques extraits des déclarations de Georges Brousse alors qu’il s’efforce d’étendre la diffusion de son journal au département de l’Aude et au pays biterrois en 1936 (p. 243, les autobus de l’Aude et les automobiles), l’apparition fugace de la Société narbonnaise de location de véhicules, chargée de transporter vers l’Aude L’Indépendant ressuscité en avril 1950 (p. 515), les vendeurs et les kiosques de Perpignan (p. 520 et 533). Il y a là une lacune importante, probablement due à l’état des sources, mais aussi à un manque de réflexion sur les charges de l’entreprise, auxquelles il aurait été bon de consacrer quelques paragraphes du chapitre 21, même si les sources étaient muettes : des comparaisons avec d’autres journaux de la période auraient été bienvenues. Quant à l’audience du journal, Gérard Bonet commet par deux fois une erreur inexplicable, alors que son tableau 10, p. 693, est parfaitement clair. Quatre fois de suite, les administrateurs du journal donnent aux actionnaires le « total de la diffusion annuelle » : 80 000 exemplaires en 1868, 650 000 en 1875, 832 697 en 1880, 857 965 en 1881, tous chiffres que l’auteur n’a pas de mal à convertir en diffusion moyenne au numéro : 770, 2 076, 2 280, 2 350. Pourquoi faut-il qu’il se méprenne ensuite au point de nous dire, p. 118 et 121, que la politique de séduction du journal « s’avère payante, puisque de 80 000 exemplaires en 1868, le lectorat de L’Indépendant passe à 650 000 en 1875 », « toujours en 1875, son lectorat est estimé à 650 000 personnes contre 80 000 en 1868 ». Que de confusion alors que le département compte tout juste 182 000 habitants en 1851, 212 000 en 1901, et alors que le lectorat n’est jamais que le nombre des lecteurs du même numéro d’un journal !
Gérard Bonet présente aussi une remarquable série statistique sur les bénéfices de l’entreprise, mais il ne l’exploite pas autant qu’on aurait pu l’espérer : pourquoi ne pas leur avoir consacré le graphique n° 5, p. 302, en lieu et place de ce graphique des acquisitions immobilières à la courbe si mal venue (alors qu’il aurait fallu à l’évidence des bâtonnets), un graphique qui ne montre pas grand-chose ? Et surtout, pourquoi avoir si peu exploité cette série statistique ? tout juste parle-t-il du sommet de 1881 (à 23 948 F), sans autrement détailler le reste des chiffres, ni avoir souligné comme il le fallait l’extraordinaire changement d’échelle entre les chiffres des années 1890 (à peine 3 000 F les mauvaises années, plus de 18 000 F les bonnes), et celui de 1909-1910 (plus de 325 000 F) : la publicité est certes revenue, après les difficiles années 1890, mais aussi et surtout le journal s’est de plus en plus écarté du « point mort » de rentabilité grâce à la hausse de son tirage et de sa diffusion, un point au-delà duquel tout est bénéfice ; suivant l’adage bien connu, « plus l’on tire et l’on vend, plus il y a de bénéfice », le journal tiré à 5 000 fait 18 000 F de bénéfice les bonnes années, alors que tiré à 20 000, on le voit amasser 325 000 F. Naturellement, il est difficile d’en dire plus, d’autant plus que c’est compter sans l’évolution des annonces, ni les bénéfices des travaux de labeur de l’imprimerie. On comprend en tout cas la prospérité des années 1914-1944, alors que le journal ne cesse d’augmenter tirage et diffusion.
L’étude de la progressive mécanisation de l’atelier de tirage de l’imprimerie du journal est très éclairante. Le journal s’équipe prudemment en débutant pas une série de machines en blanc – l’Indispensable de Marinoni (1871), puis les deux Universelles (1875 et 1883) – et joue manifestement sur ses formats afin de réduire encore le temps de tirage : en septembre 2000, lorsque Gérard Bonet m’en avait écrit, nous n’avions compris ni l’un ni l’autre pourquoi devenu quotidien en 1874, le journal avait réduit de moitié son format ; il m’apparaît très clairement aujourd’hui qu’il s’agissait moins de réduire le travail de la rédaction, que de réduire le temps de tirage, en tirant le journal sur des demi-feuilles de papier, ainsi qu’on le faisait à la fin du xviiie siècle avec les journaux de format in-4° : les quatre pages du journal étaient composées tête-bêche dans une seule et même forme imprimante, après tirage du recto, on tirait le verso, il ne restait plus qu’à massicoter par le milieu la feuille pour avoir deux exemplaires parfaitement identiques. Réduction de moitié du temps du tirage, mais aussi de la mise en train, puisqu’une seule était désormais nécessaire. Je reviendrai ultérieurement sur le processus. Il faut remercier Gérard Bonet de permettre de telles hypothèses. Je note que le journal resta imprimé en demi-feuilles jusqu’en 1892, les presses Universelles de format de plus en plus grand permettant l’accroissement de format du journal. Avec la presse à réaction et à retiration Koenig de 1892, le tirage est plus rapide, mais il s’agit toujours d’un journal en demi-feuille. En 1901 et 1902, sont installées les premières rotatives, pour effectuer encore plus rapidement un tirage croissant. La mécanisation de la composition arrive plus tardivement qu’ailleurs avec la première linotype en 1912. Le journal fait travailler 8 linotypes en 1923, une douzaine en 1944. Les rotatives sont périodiquement renouvelées : en 1913-14, 1922, 1931. Gérard Bonet nous dit que cette dernière rotative, une Winkler construite exprès pour les ateliers assez exigus de L’Indépendant, avait trois groupes d’impression, deux verticaux et un horizontal, mais sa photographie et son plan, situés dans le cahier photographique du livre, ne nous présentant que deux groupes, l’un vertical, l’autre horizontal, on peut penser qu’un troisième leur fut ajouté plus tard. Une autre photographie, p. 329, le « flashage d’une une de Midi-Soir », l’annexe audoise de L’Indépendant à la fin des années 1930, demande à tout le moins quelques explications que l’auteur ne nous donne pas. L’Indépendant monte assez tardivement son propre atelier de photogravure, en 1934 seulement. On ne dira rien ici sur le matériel de clichage au plomb, ni sur les machines qui complètent ce magnifique outil industriel, faisant travailler plus ou moins 150 employés et ouvriers du Livre en 1944, sans compter les ouvriers de l’imprimerie de labeur en lithographie.
Encore que Gérard Bonet n’ait pas consacré un chapitre à la rédaction du journal, dans lequel il eut été commode de trouver regroupé tout ce qu’il nous dit au long de ses deux premières parties, il est intéressant de lire ce qu’il nous rapporte sur les salaires du rédacteur en chef et de ses journalistes, nettement plus bas qu’à Paris et à Toulouse : en 1910, le salaire de Jules Escarguel, le rédacteur en chef, n’est que de 500 F (alors que celui d’Arthur Huc, rédacteur en chef de La Dépêche est de 3 000 F), ceux du secrétaire de rédaction et des deux rédacteurs : 330, 275 et 250 F. Il est vrai que la Société du journal distribue en fin d’année des gratifications équivalant à un treizième mois, voire même à deux treizièmes mois pour le rédacteur en chef (p. 165-166). Ces salaires sont augmentés en janvier 1920, pour tenir compte de l’inflation des prix (p. 184), et les augmentations et autres primes se multiplient avec la prospérité des années 1920-1930 (p. 193-194). L’argent paraît facile à la nouvelle génération des dirigeants du journal : on roule en belles automobiles, on vit à Paris pour Charles-Emmanuel Brousse ou à Perpignan mais désormais ailleurs qu’au journal pour son frère Georges, le directeur. Les ouvriers du Livre et les employés de l’imprimerie bénéficient eux aussi de l’abondance, ce qui explique que les grandes grèves de 1936 aient eu peu d’écho auprès d’eux. Ils se souviendront de cette belle période de prospérité au moment de la résurrection du journal en 1950. Le lecteur pourra lire une intéressante annexe, p. 698-700, sur « la question sociale à L’Indépendant ».
Qu’ajouter à tout cela ? Peut-être cette remarquable correspondance de Georges Brousse et d’Edouard Chichet, président du conseil d’administration des deux sociétés du journal et de l’imprimerie, alors que Brousse mobilisé dans l’Est de la France, ronge son frein pendant la « Drôle de guerre » et prodigue plus souvent des critiques que des encouragements à ses rédacteurs restés à Perpignan (p. 272-279) : on croit être dans la salle de rédaction, lors de la conférence des rédacteurs. Et aussi quelques interrogations. P. 152, le nouveau tarif des annonces en 1901 – là aussi, on aurait aimé avoir une ou deux pages de synthèse sur les évolutions de ce tarif – serait lié au changement de format et de colonage et aurait eu « pour effet de réduire la justification, donc de multiplier les lignes et ce faisant d’augmenter le prix de la publicité facturée… à la ligne. C’est ainsi que le 16 janvier 1901, les réclames passent de 40 centimes la ligne à 75 centimes page 2, à 60 centimes page 3 et les annonces de 25 centimes à 30 centimes en page 4 ! ». Six colonnes au lieu de cinq, certes, mais aussi une page plus large de 80 mm avec le nouveau format (430x560 mm) contre les 350x480 mm de l’ancien, amplement de quoi mettre une sixième colonne, sans trop réduire la justification générale du colonage. Gérard Bonet nous informe dès l’introduction de son livre qu’il ne s’est pas livré à une étude du contenu de L’Indépendant des années 1868-1944. On ne peut que respecter ce choix, d’autant plus que l’évolution du format et, moins précisément cependant, celle du système rubrical, ont été présentées. Il apparaît cependant qu’un tel choix a gêné l’étude du caractère local du journal. On nous dit qu’il devait avoir plus ou moins 300 correspondants locaux en 1936 (p. 244-245), et on nous présente en annexe la carte des communes du département. C’est bien peu et la carrière est ouverte aux chercheurs qui voudront bien relever systématiquement les nouvelles locales de plusieurs années choisies selon un échantillon permettant de mesurer l’emprise progressive du journal sur son territoire de diffusion. Ce pourra être fait quand nous disposerons de la reproduction numérisée attendue.
Ces quelques critiques ou interrogations le prouvent : ce bon livre a été lu attentivement et le crayon à la main ; il vient apporter à tout ce que l’on savait déjà de la presse départementale et/ou régionale, l’ambiance, le caractère, les habitudes et les attitudes du journalisme roussillonnais. Outre son cahier de photographies et quelques autres documents reproduits (par exemple quelques-unes du journal) qui font un peu regretter que l’on n’ait pas eu un plan cadastral de ce pâté de maison occupé par L’Indépendant entre la préfecture et l’hôtel de ville de Perpignan (on aurait mieux compris les agrandissements successifs de ses locaux), il faut remercier l’auteur de ses graphiques et tableaux p. 296-302 et 674-694, accompagnés de riches annexes, dont les repères chronologiques (p. 637-644) et les biographies indicatives (p. 647-673) rendront bien des services, de même que l’index des noms puis celui des journaux (p. 737-752).
Gilles Feyel
Recension publiée dans Le Temps des médias, n° 5, automne 2005, p. 219-225.