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Médias - Communication

Ouvrage : Jeremy Tunstall, The Media Were American. The U.S. Mass Media in Decline (Oxford U.P., 2007). Recension par Michael Palmer.

Quarante ans après avoir publié The Media Are American, qui eut un fort impact dans les pays anglophones, J. Tunstall publie en 2007 un ouvrage dont le titre annonce le déclin (mais non la « chute », l’auteur n’endosse pas les habits d’Edward Gibbon…) de l’empire des médias américains. J. Tunstall, alliant sa formation de sociologue britannique et un questionnement de chercheur en communication internationale, adopte une vision résolument globale pour cerner les mutations en cours depuis 40 ans. L’ouvrage, qui dispose d’un index, très précieux, comporte vingt chapitres répartis en quatre parties. L’auteur commence par démontrer le déclin relatif des médias américains (radio, télévision, cinema, presse, agences) à travers le (...) Lire la suite

Ouvrage : Julie Bouchard, Comment le retard vient aux Français (Presses universitaires du Septentrion, 2008). Recension par Claire Blandin.

Le pari de l’auteure de cet ouvrage est de faire du « retard français » un objet de sciences sociales, en étudiant le discours sur le retard. C’est donc la naissance, la construction, l’évolution et la diffusion de ce discours qu’analyse l’ouvrage. Il est centré sur les discours sur la recherche, l’innovation et la compétitivité, des années 1940 aux années 1970. Présente dans l’espace public depuis le xviiie siècle, la rhétorique du retard se développe dans les productions scientifiques, politiques et médiatiques. Etudié dans le domaine des sciences et des techniques, le retard pose tout d’abord la question des échanges entre les disciplines. La dimension géographique apparaît ensuite essentielle, les études internationales (...) Lire la suite

Ouvrage : Peter S. Grant, Chris Wood, Le Marché des étoiles. Culture populaire et mondialisation (Les Éditions du Boréal, 2004). Recension par Scylla Morel.

Écrit en 2003, ce livre paraît alors que le monde des industries culturelles est confronté à d’importants bouleversements internationaux qui semblent menacer la création et la diffusion des biens et la diversité culturelle. « Jusqu’à quel point les politiques culturelles doivent-elles être assujetties aux accords commerciaux […] ou au régime commercial multilatéral de l’OMC ? » interrogent les auteurs. Cette interrogation demeure, et ce malgré l’élaboration par l’UNESCO, le 2 novembre 2001, d’une « Déclaration universelle de la diversité culturelle ». Elle a pourtant été suivie, en octobre 2003, d’une conférence au cours de laquelle le secrétaire général de l’UNESCO s’est vu confier l’élaboration (...) Lire la suite

Ouvrage : Tristan Mattelart (dir.), Médias, migrations et cultures transnationales (De Boeck / INA, 2007). Recension par Virginie Sassoon.

Médias, migrations et cultures transnationales est un ouvrage collectif qui nous permet de saisir la complexité des enjeux transnationaux générés par les flux concomitants de médias et de migrations. Dans le premier chapitre, Tristan Mattelart effectue une synthèse critique des travaux anglo-saxons sur la question des médias et des migrations. Cette partie constitue donc une porte d’entrée théorique aux contributions qui suivent. Seule Marie-France Malonga traite ensuite directement des représentations médiatiques des populations issues de l’immigration. Face à un petit écran qui les exclut et les stigmatise, l’auteur constate que les « stratégies identitaires » des minorités noires consistent à se tourner vers les figures noires de (...) Lire la suite

Ouvrage : Ivan Chupin, Nicolas Hubé, Nicolas Kaciaf, Histoire politique et économique des médias en France (La Découverte, 2009). Recension par Claire Blandin.

Si les auteurs ont choisi cette thématique commune pour travailler ensemble c’est que, pour ces chercheurs en science politique, le retour historique permet de mettre en perspective les débats contemporains sur les rôles sociaux des médias et leur avenir. Ils adoptent donc une « perspective diachronique » pour « identifier les facteurs qui ont contribué à dessiner » le système médiatique français. Leur définition des médias comprend les supports chargés d’offrir à leur public des représentations de l’actualité (presse, radio, télévision et internet). Il s’agit d’étudier les « transformations matérielles et leurs incidences sur les structures sociales, les pratiques de communication, les relations entre le peuple et le pouvoir politique ». Les médias sont donc principalement appréhendés comme des « outils constitutifs des luttes politiques ». Mais les auteurs veulent également parler des acteurs du monde des médias et de l’évolution des logiques économiques, soulignant combien les contraintes financières existent à toutes les époques. Pour eux, cette histoire des médias s’inscrit bien sûr dans un cadre plus large, et accompagne un double mouvement : la démocratisation et l’extension du capitalisme. Ils s’appuient sur de régulières références à la bibliographie présente en fin d’ouvrage, qui rassemble les livres de synthèse déjà publiés sur les médias.

Le plan chronologique choisi débute en 1631 par une longue partie couvrant plus de deux siècles de censures. Le caractère artisanal de la production, la faiblesse du lectorat et la dépendance par rapport au pouvoir politique apparaissent comme des points communs à ces époques successives. L’ouvrage fait appel à quelques références bibliographiques originales (comme l’Histoire de France à travers les journaux du temps passé de Rossel), et, surtout, propose dans les encadrés (marque distinctive de la collection) de très utiles synthèse de recherches plus ponctuelles. Les grandes étapes de l’histoire des médias sont systématiquement replacées dans le contexte de l’histoire politique de la France (comment La Gazette permet de légitimer les choix diplomatiques de Richelieu) et situées dans les évolutions économiques et financières (les systèmes de réimpression de la dite Gazette en province facilitent sa diffusion). La Révolution est placée au centre de l’émergence de l’espace public au xviiie siècle, et plus que l’explosion elle-même du nombre des journaux, c’est le contenu de ceux-ci qui est étudié. Sur cette période bien balisée par l’historiographie, l’ouvrage tente le renouvellement des terminologies (choisissant la « contre-révolution des pouvoirs publics » pour parler des années 1792-1870). Il prend bien en compte les mutations socio-politiques du pays, en s’intéressant par exemple à l’émergence de la presse ouvrière au xixe siècle.

L’abandon volontaire de la périodisation offerte par l’histoire politique est maintenant classique pour l’histoire des médias du premier xxe siècle : la Première Guerre mondiale n’est, ici aussi, plus vue comme une rupture, mais intégrée à un long âge d’or de la presse qui se prolonge jusqu’à la fin de l’entre-deux-guerres. Le choix d’intégrer le second conflit mondial à la période suivante de « redéfinition de l’offre médiatique » est plus original. Il est justifié par un « retour du politique » dès 1939. Pourquoi n’être pas remonté alors jusqu’aux projets du Front populaire ? Sur la période suivante, une autre limite apparaît (mais elle est inhérente au format du livre et aux choix mentionnés en introduction) : en restant centré sur l’information, l’ouvrage passe à côté du renouvellement de l’offre médiatique par le divertissement (ainsi pour la presse magazine, envisagée seulement sous l’angle des « news »).

Couvrant la période des années 1970 à nos jours, les deux derniers chapitres sont sans doute les plus innovants et les plus précieux de l’ouvrage. La synthèse proposée sur la période de « libéralisation et privatisation de l’audiovisuel » permet une bonne périodisation du très contemporain. Le dernier chapitre sur le « brouillage des frontières médiatiques » constitue enfin le meilleur aboutissement du projet annoncé en introduction ; il entre dans les débats contemporains avec une démarche analytique très intéressante.

L’historien des médias ne peut que saluer la publication de cette nouvelle synthèse, qui sera précieuse pour les chercheurs et les étudiants. A côté des ouvrages de Jean-Marie Charon ou de la Sociologie du journalisme d’Erik Neveu, elle vient compléter l’offre d’excellente qualité de la collection « Repères » sur les médias.

Claire Blandin

Recension publiée dans Le Temps des médias n° 13, Hiver 2009-2010, p. 240-241.

Ouvrage : Annie Lenoble-Bart, André-Jean Tudesq, Connaître les médias d’Afrique subsaharienne. Problématiques, sources et ressources (Karthala, 2008). Recension par Scylla Morel.

À la fin des années 1980, A.-.J. Tudesq a coordonné la création du Groupe de recherche et d’étude sur les médias africains (GREMA), constitué au sein du Centre d’études des médias de l’Université Bordeaux 3. Grâce à la collaboration de chercheurs africains et aux échanges permanents entretenus avec le Maghreb comme avec l’Afrique sub-saharienne, un grand nombre de travaux ont déjà vu le jour. Il faut donc savoir gré aux auteurs d’avoir rédigé sur les médias d’Afrique noire l’ouvrage de synthèse en langue française qui manquait. En outre, ils se démarquent de l’ouvrage pionnier de William A. Hatchen Mass communication in Africa : an annotated bibliography (Madison, University of Wisconsin, 1971) par leur souci de respecter une règle (...) Lire la suite

Ouvrage : Terhi Rantanen, When News Was New (Oxford, 2009). Recension par Michael Palmer.

« Temps », « espace », « nouveauté », « récit », « protagonistes de l’événement », « techniques et marchés » (publics inclus) : voici quelques-uns des mots clés qui pourraient définir cet ouvrage de Terhi Rantanen, finlandaise d’origine, professeure de la London School of Economics et responsable d’un cursus en communication internationale. Cet ouvrage revisite des travaux anciens de l’auteure dans une perspective marquée par les débats en cours sur la redéfinition de la nature des news.

Le concept moderne des news, à l’en croire, est fortement façonné par le rapport entre les publics, auxquels les récits (...) Lire la suite

Ouvrage : Sylvie Thiéblemont-Dollet (dir.), Minorités interculturelles et Médias (Presse Universitaire de Nancy, 2009). Recension par Virginie Sassoon.

Dirigée par Sylvie Thiéblemont-Dollet, cette publication s’inscrit dans la lignée de deux précédents ouvrages, L’interculturalité dans tous ses états (2006) et Art, médiation et Interculturalité (2008). Son objectif est de présenter de nouveaux questionnements interculturels et d’offrir plusieurs analyses autour de la notion de « visibilité interculturelle » des populations immigrées et/ou d’origine immigrée en Europe et ailleurs, dans les espaces publics et médiatiques, avec un focus particulier sur la situation des femmes. Dans la première partie de l’ouvrage, intitulée « Minorités interculturelles au féminin », l’article de Philippe Hamman dresse un état des lieux des travaux scientifiques en retenant la notion de rapports sociaux de sexe, qui s’est imposée dans les années 1980 en sociologie en France. Contrairement au concept d’origine anglo-saxonne de « genre », « illustration de la force du flou » et dont la polysémie explique le succès de ses multiples appropriations, la notion de rapport sociaux de sexe permet de souligner trois traits majeurs pour l’auteur : la place centrale de l’antagonisme, celle du travail (comme levier de domination et d’émancipation), et les interactions entre rapports de sexe et de classe. Les observations récentes révèlent des évolutions contradictoires : la réduction des inégalités et leur maintien dans l’espace domestique, l’espace public, l’école et la sphère professionnelle. L’auteur propose un panorama des concepts et théories, à travers deux thématiques aux entrées multiples : le travail comme analyseur des rapports sociaux de sexe et les espaces des féminismes et des antiféminismes. Pour sa part, Irma Ramos Santana s’est intéressée à la situation des femmes immigrées d’Amérique latine dans le contexte de la mondialisation, en France, en Espagne et en Italie. Si ces femmes se sont intégrées au marché du travail des sociétés d’accueil, du fait de leurs flexibilité, mobilité et disponibilité, leur participation à l’espace public reste marginale. Des espaces publics alternatifs se sont donc constitués, tels que les blogs sur Internet, qui permettent à ces groupes minoritaires subordonnés de formuler « leur propre interprétation de leurs identités, leurs intérêts et leurs besoins ». Ces arènes discursives parallèles font émerger « les attentes sociales de ceux qui sont sans moyen d’expression parce que non constitués en locuteurs sociaux : les femmes immigrantes dans un monde globalisé ». Néanmoins, cela ne signifie pas que ces minorités soient reconnues dans les espaces publics et le dialogue politique. L’auteur souligne dans cette perspective le rôle – souvent défaillant – de l’Etat-nation pour assurer l’interface entre les minorités et la société d’accueil et faciliter leur insertion.

De son côté, Estrella Israël Garzon décrypte les mécanismes et les méfaits du traitement médiatique des violences faites aux femmes en Espagne, souvent appréhendées comme une fatalité. Si la visibilité accrue des mauvais traitements a permis de transformer ce qui relevait du privé en un problème social, l’auteur dénonce une tendance à la spectacularisation et une attitude compassionnelle vis-à-vis des hommes violents. Elle donne des pistes pour un autre journalisme, social et interculturel, à même de traiter ce sujet avec plus de justesse, de cohérence et de profondeur. Elle recommande par exemple l’adoption d’un « code de bonnes pratiques », le développement de l’information numérique et de dossiers spéciaux, dont les textes sont complétés par d’autres ressources multimédia. A travers la question des violences envers les femmes, l’auteur interroge les pratiques professionnelles, la déontologie, l’engagement, et plus largement la responsabilité des médias pour « stimuler l’élaboration de codes moraux pour bannir les messages sexistes ou permissifs ».

La contribution de Sylvie Thiéblemont-Dollet revient sur la situation des femmes immigrées en France et leur militantisme, à travers le mouvement « Ni Putes Ni Soumises », de 2000 à 2008. Les femmes issues de l’immigration ont un sentiment d’exclusion et vivent des discriminations multiples en raison de leur statut social, de leur origine et de leur lieu d’habitation. Néanmoins, elles ont la volonté de faire entendre leur voix et de participer à l’espace public. L’auteur revient sur l’histoire de ce mouvement et analyse la façon dont la prise de parole civique de ces femmes participe de la désacralisation de la parole politique et fait apparaître de nouvelles formes de participation publique. La stratégie communicationnelle de ce mouvement s’est aussi fondée sur l’expression d’une parole identitaire, une identité de femme, immigrée, vivant dans les quartiers. Cette stratégie de reconnaissance et de visibilité, pour se distinguer des autres femmes et féministes mais aussi des hommes des banlieues, a notamment « contribué à effacer l’invisibilité militante au féminin ». De son côté, Gabriela Torres Ramos s’est intéressée au rôle central des femmes âgées dans les groupes Nahuas peuplant la région centrale du Mexique Ancien (900-1521). Porteuses de la mémoire collective, ces femmes sont respectées de tous. Considérées comme des sages et la mémoire vive de la société, « ces femmes âgées ont eu la charge de transmettre les connaissances historico-mythiques, les doctrines religieuses et les préceptes moraux. » L’article fait ainsi apparaître leur rôle capital dans l’éducation et comme agents d’intégration de l’individu à la société.

Dans la deuxième partie de la publication, intitulée « Minorités et médias », l’article de Sabrina Cataldo propose un panorama du paysage audiovisuel local du bassin mosellan. Elle y présente son questionnement de recherche qui porte sur la façon dont l’immigration est traitée au sein de ces télévisions locales, considérées comme des outils de proximité et bénéficiant d’une forte crédibilité auprès de la population.

Le texte de Laurence Schwob revient sur la situation des aborigènes d’Australie, un « peuple meurtri », victime de massacres et d’une politique d’assimilation qui a eu pour objectif « d’enrayer leur culture ». L’auteur montre que leur art pictural a été une forme de résistance contre la colonisation et un moyen de sensibiliser l’opinion publique. Aujourd’hui, même si de fortes inégalités subsistent, ils se sont emparés d’Internet comme un moyen de communication et d’expression. L’article de Christophe Vatter propose quant à lui une analyse comparative de deux séries télévisée, l’une canadienne, Pure Laine, l’autre allemande, Le turc pour débutants. L’auteur montre comment la télévision peut refléter, selon diverses modalités, les réalités de la coexistence de différentes communautés, et surtout interroger notre rapport au multiculturel et à l’identité culturelle. Enfin, la contribution de Linda Saadaoui permet de mieux comprendre les dynamiques contemporaines de la société luxembourgeoise, qui compte trois langues officielles, près de 150 nationalités différentes et de nombreux travailleurs transfrontaliers. L’auteur revient sur « la guerre des drapeaux », fait divers apparu dans la presse luxembourgeoise en 2006 à l’occasion de la compétition mondiale de football. Il apparaît que la question identitaire, vue ici à travers l’affichage des drapeaux des pays d’origine, reste, au-delà du « paradigme économique », décisive et révèle la position du minoritaire et du dominant.

Si l’on peut déplorer l’absence de cadrage théorique concernant certaines notions clés, telles que « minorités interculturelles » ou « visibilité interculturelle » en préalable, ainsi que l’hétérogénéité des textes, tant sur le plan du contenu que de la forme, cet ouvrage collectif réunit des contributions d’une richesse incontestable et ouvre de stimulantes pistes de réflexions concernant les enjeux de la représentation et de l’expression des minorités dans l’espace public et médiatique.

Virginie Sassoon

Recension publiée dans Le Temps des médias n° 14, printemps 2010, p. 264-266.

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